top of page

Transformation numérique : l’agilité et la gouvernance comme leviers de croissance des ETI

Dernière mise à jour : il y a 14 minutes

Dans un contexte de transformation numérique accélérée et de menaces cyber croissantes, les DSI, comme les directeurs de l’innovation, sont aujourd’hui confrontés à une triple exigence : renforcer leur gouvernance, aller plus vite et sécuriser davantage pour rester compétitives et résilientes.

Cette accélération impose de fait une agilité organisationnelle, le recours à des méthodes adaptatives, mais aussi une capacité à anticiper les évolutions à venir tout en préparant le passage à l’échelle pour les ETI. La veille stratégique, la coopération entre métiers et la convergence entre innovation et cybersécurité deviennent des leviers décisifs.

La transformation des SI dans une entreprise en forte croissance


« Quand je suis arrivé fin 2017, le groupe STERNE comptait 450 collaborateurs pour environ 100 millions d’euros de chiffre d’affaires. Aujourd’hui, nous sommes 2 300, avec un chiffre d’affaires compris entre 500 et 600 millions. La DSI est passée de 6 à 38 personnes. Cela donne une idée de l’ampleur de la croissance, portée à la fois par une dynamique interne soutenue et de nombreuses opérations de croissance externe. » explique Boris Pouderous, DSI du Groupe STERNE. Par définition l’ETI est en croissance rapide et doit donc adapter l’ensemble de son modèle à cette nouvelle réalité. Au premier rang : la nécessité de repenser l’architecture IT pour accompagner cet élan afin qu’elle puisse être un levier stratégique de la croissance de l’entreprise et non un frein. « À mon arrivée, l’infrastructure informatique était largement obsolète : systèmes, logiciels métiers, tout était à reprendre. Il a fallu absorber une croissance très rapide, l’accompagner sans la subir, et dans le même temps, reconstruire le système d’information brique par brique pour qu’il devienne un véritable levier de transformation. » poursuit Boris Pouderous.


L’agilité, une nécessité plus qu’un luxe


Pour absorber cette croissance tout en réalisant les changements nécessaires ne peut se faire qu’en s’appuyant sur un mode agile. Qui dit agilité, dit progression et transversalité. « Le DSI est aujourd’hui un acteur stratégique, notamment parce qu’on ne bascule pas d’un modèle à un autre du jour au lendemain : on avance par itérations. Cette logique agile ne concerne pas uniquement les équipes IT. Si les besoins ne sont pas exprimés de manière agile, si le déploiement ne suit pas cette même dynamique partagée par la direction, alors le projet échoue. L’agilité, bien appliquée, est aussi un puissant facteur de réduction du risque. » soutient Frédéric Charles, Directeur Stratégie digitale & Innovation - SUEZ Smart Solutions. Dans le secteur de la presse, quoi qu'il arrive, l'information primera. Alors l’agilité est presque une seconde nature. « Dans notre métier, l'information prime sur tout : on peut mobiliser des équipes en pleine nuit parce qu'une fenêtre de tir se présente entre 3h et 4h du matin. Et parfois, à 3h01, on nous interdit toute intervention sur le système car il faut traiter une information. Ce sont des réalités opérationnelles que nous vivons quotidiennement. Il est certain que nos projets ne suivent pas les mêmes temporalités que dans d'autres secteurs. » souligne Thierry Salon, responsable du département cybersécurité et infrastructure de l’AFP. « Dans une entreprise où l’urgence fait partie de la culture, on ne peut pas se permettre de bloquer la production avec des projets informatiques lourds. L’agilité s’est imposée comme une nécessité : nous avons des livrables toutes les deux semaines. Cela permet aux métiers – même très sollicités – de voir rapidement des résultats concrets, de mesurer les avancées et d’ajuster leurs besoins. L’agilité ne doit pas rester confinée à la DSI : elle doit irriguer l’ensemble de l’organisation. » partage Boris Pouderous. Véritables piliers stratégiques pour les ETI, le CRM et la gestion de sa supply chain sont essentiels : « Lorsque l'on évoque le CRM et la supply chain, on pense souvent à deux mondes séparés. Mais dans une ETI, il s'agit de la colonne vertébrale. C’est ce qui fait le lien entre la promesse client, la production et la livraison. Chez Petit Forestier, chaque camion frigorifique est configuré en fonction du besoin : transporter des vaccins, de la viande ou des yaourts, ce n’est pas la même chose. Le CRM permet de comprendre le client, mais aussi de connecter ses besoins à l’usine, au coût, au délai. Toute la chaîne est imbriquée. Et si ça décroche – même juste sur la gestion de stock – l’impact est immédiat. L’agilité, elle est là : dans cette chaîne, pilotée en temps réel, entre systèmes et processus. » explique Frédéric Charles. A contrario, un manque d’agilité marque d’importantes conséquences comme en témoigne la migration chaotique du SI de GIFI. Lancé dès 2016, le projet de transformation digitale baptisé Millenium devait permettre de soutenir la croissance de l’enseigne qui souhaitait passer de 600 à 1000 magasins et 10 000 collaborateurs contre 6 800 aujourd’hui. Mais en 2024, force est de constater que ce projet est un échec. « Ce problème informatique fait que nous n'avons plus de visibilité ni sur nos stocks, ni sur nos commandes, ni sur nos approvisionnements » avouait sur TF1 le porte-parole du groupe. Conséquence financière brutale : une perte de 9 % du chiffre d'affaires. « L’ETI est toujours fragile » résume Frédéric Charles.


Pilotage stratégique et gouvernance de la data


Une transformation numérique réussie passe par une gouvernance adaptée. « En matière de gouvernance, on peut s’appuyer sur un cadre solide et reconnu. Le guide d’audit de la gouvernance du SI élaboré par le CIGREF propose 12 vecteurs essentiels à analyser pour piloter efficacement la gouvernance. Parmi les plus importants : l'intégration des enjeux numérique dans le plan stratégique de l'entreprise, la maitrise de la réalisation des projets et solutions, la prise en compte des risques numériques dans les enjeux stratégiques ou encore le pilotage du budget et de la performance du SI. Dans une ETI, toutes ces dimensions ne sont pas forcément stratégiques dès le départ, mais ce référentiel reste un outil précieux pour structurer et faire évoluer la gouvernance. » évoque Frédéric Charles. Par ailleurs, la culture de la data doit irriguer toute l’organisation. « La donnée est un élément clé dans toute transformation numérique. Sans l’instauration d’une véritable culture de la donnée au sein de l’entreprise, il devient impossible de prendre des décisions réellement éclairées et fondées sur des informations tangibles. Dans une ETI, la question des projets à lancer devient cruciale : les moyens sont limités, les opportunités multiples, et il faut donc faire des choix structurants. La priorisation est un acte stratégique, car elle engage sur un temps long. La data joue alors un double rôle : elle permet d’arbitrer les projets et devient un outil d’évaluation pour mesurer l’avancement et structurer cette croissance rapide. Cette montée en puissance vers une nouvelle échelle suppose une transformation de posture : on passe d’une logique de PME à celle d’ETI. Mais ce basculement ne se décrète pas, il s’accompagne. Il implique une structuration progressive, pilotée, où la donnée devient un levier de transformation. » partage Frédéric Charles. Une structuration qui nécessite évidemment une gouvernance et une intégration de la DSI au plus haut niveau décisionnel de l’entreprise et une prise en compte de cette transformation dans les budgets de l'entreprise, d'où l'importance de l'intégration du DAF dans les projets de transformations du SI. « Avec la DSI, le travail transverse nous permet d’instaurer un climat de confiance, de faciliter les échanges et, in fine, de prendre les bonnes décisions, même lorsqu’il s’agit de commandes importantes, comme cela est souvent le cas en IT, pouvant atteindre plusieurs milliers d’euros. Lorsqu’on dispose d’éléments clairs, bien compris et correctement vulgarisés, la prise de décision s’en trouve grandement facilitée. Une décision éclairée repose sur des informations tangibles, qui offrent une vision globale de ce que cela représente pour l’ensemble de l’entreprise, en la replaçant au cœur même de sa mission et de son savoir-faire. Concernant la maîtrise des projets, deux notions fondamentales se dégagent : la gestion du portefeuille de projets et le pilotage de chaque projet individuellement. Il est indispensable de choisir les projets les plus pertinents, notamment dans une ETI où les possibilités sont nombreuses, et où la tentation peut être forte de tout entreprendre simultanément. La priorisation constitue donc une étape clé, qui permet d’anticiper la durée des projets. Par ailleurs, les aspects financiers doivent être mis en lumière dès le départ afin d’éclairer ces choix et d’assurer une gouvernance rigoureuse. » note Christophe Tronchet, CFO de Monaco Telecom.

La question de la souveraineté devient évidemment cruciale. « La gouvernance de la donnée passe nécessairement par la souveraineté, surtout dans un contexte comme celui de Monaco Telecom. En Principauté, la donnée reste en Principauté. Ce choix souverain a des implications concrètes : il influence les décisions stratégiques, oriente les budgets et impose des modèles technologiques spécifiques. Plutôt que de recourir à des solutions cloud publiques, l’option retenue privilégie le développement en interne, le recours à l’open source et la construction d’infrastructures sur-mesure. Cela permet de déployer des solutions agiles, hébergées localement dans les data center monégasques, en conservant la maîtrise totale des environnements techniques. Mais cette autonomie exige aussi un haut niveau de responsabilité en matière de cybersécurité : maîtriser son cloud, son infrastructure et ses plateformes suppose également de savoir les défendre. Tous nos clients, que ce soit des banques ou des particuliers, expriment une demande forte pour des solutions garantissant que leurs données restent stockées et traitées exclusivement en Principauté. » souligne Christophe Tronchet. D'autant que nombre de facteurs extérieurs en manqueront pas de venir perturber les projets SI avec d'importantes répercussions en matière de souveraineté. « Les enjeux géopolitiques ont un impact direct sur notre secteur. La guerre en Ukraine, par exemple, a déclenché une double crise – économique et énergétique – pile au moment où nous finalisiosn une acquisition stratégique en Allemagne, en Autriche et au Benelux. Tout cela percute notre feuille de route, notre DSI, nos projets, et nous oblige à intégrer des dimensions de souveraineté et de résilience dans chaque décision. » partage Boris Pouderous.

Face à ces défis croissants, l’agilité et la gouvernance numérique ne sont plus de simples options, mais bien des conditions sine qua non à la pérennité et à la compétitivité des ETI...

Logo de S&D Magazine

S'abonner à S&D Magazine : 

Un abonnement qui vous donne accès à tous les contenus exclusifs hebdomadaires en ligne : des articles, portraits, décryptages, podcasts et 3 magazines édition papier et numérique

© 2025 par S&D Magazine. 

bottom of page